Yves Di Manno (1954) - Al término
Al término
por Yves Di Manno
Por la noche ¿quién habló? cuya sombra
En su extensión velaba un tanto más el estanque
Donde la sola voz podía perderse —
Renaciendo por la mañana en la esperanza de su canto
Por entre las ramas extensas de las hayas
Sobre el tapiz arrugado de hojas muertas
Pisoteadas por la horda de los hombres
Que fallecieron, ya lejos de sus pueblos
Y tras repartirse allí el fruto de su saqueo
Después uno a uno se dispersaron. Sólo uno
Ha quedado, que iba a cantarles
(Estas guerras) sin haber vivido un tiempo
De paz, aunque fuese efímera, más que en el límite de otra
Frontera —sobre la tierra de aquellos
Que vivieron, no hace mucho, al borde del lago
Donde lentamente los barcos
Atracaban en silencio, pesados
Por su cosecha de madera verde. Recostado solo
Sobre el tronco de un árbol evocaba
Los países que había recorrido,
Los campos de trigo, y los desiertos
La masacre de mujeres el invierno que fueron sacrificadas
Los niños negros ahorcados —sus vientres abiertos
Por donde salían gusanos—, los cuellos cortados
De animales de carga, todas
Estas cosechas, estas granjas incendiadas
Humo y niebla en la memoria de la única
Mañana que hubiera querido callar, frente
A la tierra provisoria delante de sí,
Aunque austera. Pues algo también
Lo iluminó, y aunque no sabía ni el nombre
Ni qué misterio lo justificaba,
De pronto, bajo el árbol,
Le dio sentido a su historia:
Un fuego sobre el fuego de la noche anterior
La espada en su mano sin pasado,
Un hombre, a pesar de todo, detrás de este hombre
Apagando la ceniza de la mañana —
Para el reposo, quién sabe, solamente
De sí mismo, más allá de la página lisa y llana
De un trovador, de un guerrero.
© Traducción de Fernando G. Toledo
Au terme
par Yves Di Manno
Pour la nuit Qui parla ? dont l'ombre
En s'étendant voilait un peu plus de l'étang
Où la voix seule pouvait se perdre -
Renaissant au matin dans l'espoir de son chant
D'entre les branches étirées des hêtres
Sur le tapis froissé de feuilles mortes
Piétinées par la horde des hommes
Qui passèrent, à l'écart des villages
Et se partagèrent là le fruit de leur pillage
Puis un à un se dispersèrent. Un seul
Etait resté, qui devait les chanter
(Ces guerres) n'ayant pu vivre un temps
De paix, bien éphmère, qu'en lisière d'une
Autre frontière -sur la terre de celle
Qui vivait, naguère, au bord du lac
Oú lentement les barques
Muettes accostaient, lourdes
De leur récolte de bois vert. Adossé seul
Au tronc d'un arbre il songeait
Aux pays depuis lors traversés
Aux champs de blé, et aux déserts
Au massacre des femmes l'hiver qu'on égorgeait
Aux enfants noirs pendus - à ces ventres ouverts
D'où ruisselaient des vers -aux cols tranchés
Des animaux de trait - à toutes
Ces récoltes, ces fermes incendiées
Fumées et brumes dans la mémoire du seul
Matin qu'il aurait voulu taire, face
A la terre provisoire devant lui
Mais austère. Car quelque chose aussi
L'illuminait, dont il ne savait plus le nom
Ni quel mystère le justifiait
Mais qui sous l'arbre brusquement
Donnait sens à son histoire :
Un feu dans le feu d'hier soir
L'épée dans sa main sans passé
Un homme encore derrière cet homme
Eteignant la cendre au matin -
Pour le repos qui sait, simplement
En lui-même par-delà page et plaine
D'un chanteur, d'un guerrier.
(extrait de Solstice d'été, éditions Unes, 1989)
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